Expression libre : à propos de la révision du PLU

Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les Conseillers municipaux,
Lors de son élection, l’équipe municipale a revendiqué d’avoir été élue non pas sur un programme mais sur une méthode. Aujourd’hui, je souhaite vous faire part de mon désaccord et de ma déception quant à l’utilisation qui est faite de la méthodologie participative dans le cadre du PLU.
Lors du comité de pilotage du 5 novembre dernier, les élus ont débattu et choisi entre 5 scénarios d’évolution du village, avec des paramètres de croissance démographique et d’enveloppe foncière. Si la séance était publique, les éléments chiffrés étaient réservés aux élus. Quant au choix, entre les différents scénarios, il ne sera pas du ressort de l’ensemble des saillansons mais du panel citoyen. Les non tirés au sort doivent se contenter, comme le 29 septembre 2018, de travailler sur la reformulation d’objectifs et la recherche de sous-objectifs qu’ils inscrivent sur des post-it.
Lors de votre élection vous nous aviez également assuré que : « L’ensemble des citoyens seraient invités à participer aux futurs choix liés à l’urbanisme. » et que « Les citoyens seraient placés au cœur des décisions stratégiques. » Vous avez également déclaré « Les questions d’urbanisme ne sont pas évidentes, nous avons donc envie pour l’élaboration du nouveau PLU de donner des éléments aux citoyens pour qu’ils puissent décider en âme et conscience. »
Si c’était vraiment le cas :
L’équipe municipale aurait demandé à la population si le PLU devait être modifié ou révisé, puisque les deux options existent et que d’autres communes similaires à la nôtre ont fait d’autres choix que la révision générale.
La deuxième question aurait porté sur le mode de concertation. Chacun aurait pu être associé aux grandes décisions du PLU par des consultations populaires. Ce n’est pas le choix qui a été fait mais celui d’un panel citoyen. Ce n’est pas à proprement parler un choix de la population mais une suggestion du comité des sages constitué sans consultation de la population (Source : site de la mairie), une solution toute prête que la majorité silencieuse présente lors de la réunion publique n’a pas voulu ou osé contester et qui a été adoptée sans vote. Ainsi a été entérinée ce que je considère comme une confiscation participative.
Le hasard a-t-il bien fait les choses ? Le panel est-il représentatif de la population ? Pourquoi 10 personnes, c’est peu ? Lorsque j’ai posé la question, le 5 novembre dernier, Madame Girard, élue, m’a répondu que le choix avait été fait de s’en remettre au hasard et que l’avenir nous dirait si nous avions raison. Or, le présent donne déjà tort à ce choix puisque l’on voit peu ou pas de membres du panel citoyen participer aux ateliers et réunions du PLU, la population n’est pas vraiment en contact avec eux, il n’y a pas de compte-rendu des débats qui s’y déroulent. Le « contre-pouvoir » permettant à chacun de donner son opinion a donc été placé entre les mains de citoyens décrétés représentatifs qui tiennent leurs informations des élus intervenant au sein du panel. Nous sommes déjà bien loin d’un idéal participatif d’intervention des citoyens au plus près des décisions sans la médiation des élus !
Je souhaiterais évoquer également le café d’urbanisme N°1 du 13 novembre 2018. L’affiche annonçait trois mini-conférences traitant des résidences démontables ou habitat léger dans le cadre de la révision du PLU, avec la participation de Béatrice Mesini, chercheuse. Comme précédemment, je m’en tiendrai aux remarques sur la forme et la méthodologie utilisée :
D’abord, il est vraiment étonnant que la référence à l’association HALEM (Habitants de Logements Ephémères et Mobiles), dont l’un des objectifs est de « Faire pression et défendre l’habitat léger » (Source : site HALEM) n’ait pas figuré sur l’affiche. Il n’est pas correct d’inviter la population en mentionnant le PLU mais sans l’informer que Béatrice Mésini parlerait au nom de cette association et qu’un représentant de cette association participerait également à la réunion. Aucune mention de cette présence dans le compte-rendu de cette réunion (Source : site de la mairie).
Dans le souci de débat et de jaillissement des idées qui semblait présider à la révision de notre PLU, l’intervention de cette experte, doublée d’une militante n’était, à mon sens, pas souhaitable. Elle a immédiatement « stérilisé »le débat en utilisant des arguments d’expérience et d’autorité et les participants ont été totalement dépossédés du sujet alors que nous avions la possibilité d’en débattre pour la première fois.
De plus, cette réunion paraît bien tardive en raison de la proximité du vote du PADD et ne laisse aucun temps de réflexion à la population sur ce sujet. Béatrice Mésini y a tenu des propos très clivants renvoyant dos à dos, les habitants de logements traditionnels qu’elle a déclaré « surendettés » « incapables de comprendre que l’on veuille vivre autrement » et les habitants d’habitat léger « libres et vertueux». Ce genre de propos n’est pas bon pour l’harmonie de la commune. En tout état de cause, le format choisi pour cette réunion n’a pas permis à un débat contradictoire de s’instaurer.
Il est vraiment regrettable que la question de l’habitat démontable (yourte, tipi, roulotte, Mobil home, caravane …) et de la loi ALUR n’ait pas été abordée en ateliers, que la population n’ait pas consultée sur ce qu’elle souhaiterait faire dans sa commune, qu’elle ne soit pas invitée à travailler sur la création d’une zone proche du bourg-centre permettant à la fois une mixité sociale, générationnelle et des modes d’habitat, traditionnel et démontable, individuel et participatif. Au contraire, ce sujet n’a été abordé que sous l’angle de l’habitat démontable individuel et de la nécessité de prévoir au PLU des Secteurs de Taille et de Capacité d’Accueil Limitées (STECAL) pour permettre leur installation dans les zones naturelles ou agricoles inconstructibles. Est-ce vraiment ce que nous voulons pour notre commune ?
Je crains que la population ne soit pas véritablement associée à cette décision. Peut-être l’avez-vous déjà prise puisque vous avez accompagné trois représentants de HALEM en 2014 lors de leur rencontre avec un membre du cabinet ministériel du logement et de l’égalité du territoire ? (source : site de la mairie). La commune doit-elle obligatoirement vous suivre dans un engagement citoyen et personnel ? Lui demandera-t-on son avis sur ce sujet ?
On pourra toujours me répondre que j’aurais du exprimer cette opinion en réunion. La prise de parole en public n’est pas facile pour tous, le format et la durée des réunions PLU ne le permet pas toujours. On pourra toujours me répondre que classiquement la révision du PLU est pilotée par un groupe d’élus et un bureau d’études mandaté et que je devrais m’estimer heureuse. Eh bien non, le pouvoir devait être partagé par tous et ce n’est pas le cas. La déception est à la hauteur de l’espoir suscité par la mise en œuvre de la démocratie participative à Saillans.

Le 22 novembre 2018 – Marie-Christine CASALS – 660, chemin des Baux -26340 Saillans
Copie Monsieur Archambault garant de la concertation PLU – Commission Nationale du Débat Public